Au-delà de l’amour et de l’amitié: que faire de toutes ces autres catégories de relation?

Pour ceux qui lisent ce blogue depuis le début (ou depuis un bon bout de temps), ça devrait maintenant être assez clair qu’en théorie, l’anarchiste relationnel ne fait pas de différence ou de hiérarchisation selon la nature des relations, mais bien plutôt selon l’intensité de celles-ci et le désir tout comme la capacité que les personnes impliquées ont de développer la relation.

L’ennui, évidemment, est que ces hiérarchies sont omniprésentes dans notre environnement culturel. Il faut inévitablement soit s’y confronter, s’y conformer ou tenter de les concilier. Deux exemples courants sont la famille et les groupes professionnels.

Le second est assez facile à constater. Notez par exemple le pouvoir disproportionné des médecins dans le système de la santé. S’il faut reconnaître que ceux-ci ont un rôle essentiel à jouer, demandant des capacités et des études particulières, il n’en demeure pas moins que sans toute une communauté incluant d’autres professions (pharmaciens, infirmiers, techniciens) ainsi que les patients, tout un écosystème de recherche et de nombreux intervenants en santé publique, notre système de santé ne peut remplir efficacement sa mission.

Il y a pareillement un très fort privilège social rattaché aux liens familiaux. La famille est présentée comme plus forte que tout, parfois plus importante que la loi (on pardonne sans problème à un Guy Lafleur qui ment devant le tribunal pour protéger son fils) et conditionne les rencontres sociales. Prenez à témoins les contorsions d’agenda nécessaires pour accommoder les familles reconstituées dans le temps des fêtes.

Ce privilège est même incorporé dans notre cadre juridique. Ainsi, au Québec la Loi sur les normes du travail octroi des congés en cas de décès d’un proche parent (enfants, père, mère, frère, soeur, grand-parent, petits-enfants) et ce, peu importe les circonstances de vie et la nature de la relation entre les personnes. Vous aurez un congé si votre mère qui vous a abandonné dans la prime enfance et que vous n’avez presque jamais revue par la suite décède, mais aucun si la voisine (sans lien de sang) qui vous a recueilli et élevé par la suite et accompagné tout au long de votre vie décède à son tour. Et bien entendu, vous aurez un congé si votre conjoint légalement reconnu décède, mais pas à la mort d’un membre de votre polycule.

Ces hiérarchies ont donc un potentiel de nuisance car elles favorisent un sous-groupe au détriment de l’ensemble de la communauté, et au détriment de l’importance réelle des liens tissés par les individus. En hiérarchisant, on renonce à atteindre un équilibre personnel entre différentes relations. La famille est effectivement importante, mais son importance doit être contrebalancée par l’importance qu’ont vos amis, vos amoureux (si vous faites ces distinctions), vos collègues, et ainsi de suite. La hiérarchie vous force à consacrer du temps et de l’énergie à un groupe en ignorant des relations qui peuvent porter en elles plus de potentiel.

Enfin, la hiérarchie vous prive de la capacité de décider. Si vous devez vous rendre à un évènement « parce que vous n’avez pas le choix », vous êtes en train de faire une décision hiérarchisée et non pas fondée sur vos propres besoins et désirs. Remettre en question ces hiérarchies, souvent appuyées par un ordre établi, peut être taxé d’égocentrisme mais est en réalité une preuve d’autonomie.

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