La déconstruction graduelle des normes et des préjugés entourant les relations sexuelles et romantiques nous a mené à voir plusieurs aspects des relations, notamment l’identité de genre et l’orientation sexuelle, comme étant des positions fluides sur un continuum plutôt que des variables binaires. Ainsi, nous avons, en plus des identités masculines et féminines, des identités gender-fluid, queer, voire carrément a-genre. Parallèlement, au-delà des identités hétéro et homosexuelles émerge tout un spectre bisexuel ou encore pansexuel.
Plus récemment, les composantes de l’attirance entre les personnes elles-mêmes ont fait l’objet de cette déconstruction. L’attirance sexuelle, vu comme une condition sine qua non des relations amoureuses, a été remise en question sous la pression émergente de la communauté asexuelle, soit des personnes qui ne ressentent pas ou très peu d’attirance sexuelle envers les autres. L’attirance romantique a emboîté le pas et l’aromantisme a rejoint l’asexualité dans les spectres de l’attirance interpersonnelle.
Évidemment, puisqu’il s’agit de spectres, tout n’est pas noir ou blanc. Toute une série d’identités sont regroupées sous le vocable « gray-asexuality » ou « gray-aromanticism » en anglais (ou encore « a-grise » en français). Par exemple, une personne demisexuelle ne concevra une attirance sexuelle envers une autre qu’après avoir créé un fort lien émotionnel avec cette personne.
L’émergence et surtout, la reconnaissance de ces identités est essentielle dans le contexte de l’anarchisme relationnel (et, entre vous et moi, pas mal essentielle dans n’importe quel autre cadre relationnel également) dans la mesure où elle force la remise en question des schémas relationnels standards, de la « Disney-isation » de l’attirance romantique par exemple, de l’ascenseur relationnel, ainsi de suite. Le propre de l’anarchisme relationnel étant que les paramètres d’une relation sont déterminés par les personnes impliquées dans cette relation et évoluent avec celles-ci, l’acceptation et la validation des identités sur les spectres asexuels ou aromantiques devraient aller de soi.
L’éclatement des normes comportementales quant à l’attirance permet aussi d’identifier, et éventuellement de nommer, le mix d’attirance propre à chaque individu. Par exemple, je me situe quelque part à l’inverse du demisexuel: pour ma part, je ne peux former un attachement romantique que si j’ai déjà conçu une attirance physique réelle pour la personne. Il n’y a pas encore de terme pour ça, et malheureusement d’une certaine façon ça rejoint un préjugé qu’on porte souvent aux personnes cis-masculines: penser au sexe avant tout. Ceci dit, nommer l’identité deviendrait une façon de détruire ce préjugé (ce ne sont pas toutes les personnes cis-masculines qui ont ces attirances précises, d’autre personnes partout sur le spectre du genre pourraient avoir le même schéma d’attirance, et l’attirance romantique est bel et bien forte et importante pour ces personnes).
J’invite en terminant toutes les personnes qui se sont reconnues dans les différentes descriptions présentées très sommairement ci-haut, et toutes les personnes intéressées à en apprendre davantage, à visiter la communauté de référence sur le web pour ces questions ici en français, ou en anglais par là.