Le droit, la liberté et le plaisir de choisir

Pour les personnes qui adhèrent toujours à un mode de pensée monogame exclusif, le choix d’un-e partenaire romantique a des implications énormes. Il est nécessaire de trouver « le bon » ou « la bonne », avec qui on sera prêt à embarquer dans l’ascenseur relationnel (maison, famille, etc.) pour le reste de sa vie. Comme le mot « exclusif » le sous-entend, il s’agit non seulement de choisir une personne, mais également d’exclure toutes les autres personnes en tant que partenaires éventuel-le-s.

Autrement dit, dans la monogamie, choisir, c’est l’exclusion. Choisir, c’est renoncer.

On ne renonce pas seulement aux autres en tant que partenaires romantiques, mais parfois même à certaines amitiés. La hiérarchisation des relations inhérente au système monogame fait que les amitiés sont vues comme moins importantes, moins privilégiées, subordonnés à la relation romantique principale. Pensez aux nombres d’ami-e-s que vous voyez soudainement moins souvent depuis qu’ils ou elles sont en couple (ou depuis que vous l’êtes!) pour le constater.

Bien que certaines relations non-monogames éthiques requièrent une forme d’exclusivité (on pense aux triades fermées par exemple), ce n’est pas le cas de toutes. Dans une philosophie anarchiste relationnelle, cette exclusivité n’a plus aucune raison d’être en fait, sinon rarement comme un élan temporaire unissant deux ou plusieurs personnes.

Le choix d’un-e partenaire revêt alors une toute autre siginification. Il n’est plus un geste d’exclusion, mais un geste d’inclusion. Il s’agit d’accueillir une nouvelle personne dans le cercle de nos relations, polycules, amis, amours, métamours, etc. C’est un ajout à une vie émotionnelle parfois déjà très riche: non seulement la nôtre, mais celle de toutes les autres personnes avec qui nous sommes en relation également. Au sein d’un polycule ouvert et transparent, chaque nouvelle personne est une richesse pour l’ensemble du polycule.

Vos choix deviennent ainsi un plaisir pour autrui également, et non plus une menace. De même, les choix d’autrui deviennent des opportunités de découverte pour vous. Une fois libéré de la menace de l’exclusion, on découvre l’immense joie qu’il peut y avoir à cultiver plusieurs relations simultanément.

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La non-monogamie comme stratégie de positionnement dans le marché amoureux

J’aime aborder le sujet de la non-monogamie sous plusieurs angles: psychologie, mathématique, marketing… Alors pour m’amuser un peu – et, je l’espère, pour vous divertir également – je vais traiter du sujet aujourd’hui comme on traiterait des stratégies commerciales.

Commençons par traiter l’amour, et les relations amoureuses plus précisément, comme un marché soumis aux lois de l’offre et de la demande. Chaque personne qui entre dans ce marché a des caractéristiques qui lui confèrent une valeur donnée, et recherche en contrepartie un ensemble de caractéristiques à qui elle accorde aussi une valeur. Ces relations ont un coût d’acquisition, qui se trouve être l’effort qui doit être mis par chaque partenaire pour trouver et séduire la bonne personne et faire fonctionner la relation par la suite.

Dans un modèle où l’information circule parfaitement et librement entre tous les participants du marché, il se produit quelque chose d’intéressant. Plus l’information circule, plus le marché devient homogène afin de faciliter la comparaison. Une norme relationnelle se dégage afin de diminuer les coûts (lire, l’effort) de recherche et de participation au marché: en effet, plus vous correspondez à la norme, plus le coût d’intégration à une relation diminue. Dans cet environnement de plus en plus standardisé, les participants recherchant et offrant le plus de valeur au plus faible coût se retrouvent mutuellement et graduellement, laissant au fur et à mesure que le temps avance seulement des candidats dont la valeur laisse à désirer et ne répond pas aux attentes des autres participants dans le marché.

Autrement dit, passé un certain âge/stade/étape de vie, il semble que tous les bons prospects sont déjà en couple stable. Ne déprimez pas toute de suite cependant si vous êtes toujours célibataires! Heureusement pour vous, l’information ne circule ni parfaitement ni librement, et les attentes tout comme les qualités des gens changent avec le temps. L’espoir n’est donc pas mort!

On peut décrire la stratégie ci-dessus comme une stratégie centrée sur les coûts: dans ce modèle, votre but est de convaincre le partenaire potentiel qu’avec vous, il obtiendra avec un moindre effort un plus beau couple, une plus belle relation, de plus beaux enfants, une plus grosse maison, un plus beau chalet à la campagne, etc, etc, etc. afin que vous puissiez également obtenir tout ceci avec le moins d’effort possible.

À l’opposé de la stratégie basée sur les coûts se situe la stratégie basée sur la différentiation. Cette stratégie vise directement les inefficacités de marché qui ne sont pas comblées par la première stratégie. Par exemple, il se peut que la distribution des besoins dans le marché des partenaires potentiels ne conviennent pas du tout à ce que vous recherchez, et vice-versa, que ce que vous offrez ne correspond pas aux attentes de la majorité des participants dans ce marché. Au lieu de vouloir répondre à tous les besoins de partenaires potentiels, vous vous concentrez alors seulement sur un créneau ou quelques créneaux.

Qui décidera d’adopter cette stratégie? Ce seront les personnes qui trouvent que l’effort nécessaire pour se conformer au Modèle Standard ™ des relations est trop élevée, ainsi que les gens qui réalisent que ce Modèle ne permet pas de répondre adéquatement à leurs besoins. La différentiation ouvre la porte à la non-monogamie en reconnaissant qu’un partenaire peut combler chez vous certains besoins qu’un autre ne pourrait pas, mais que ce deuxième ait à son tour la capacité de répondre à d’autres désirs, etc, etc.

Pour survivre dans ce marché, il vous faut un avantage concurrentiel – idéalement plusieurs – qui saura répondre au besoin d’un segment ou d’une niche de clientèle. Mais cet avantage n’est pas suffisant – il vous faut aussi être en mesure de diffuser et de maintenir cet avantage auprès de ce segment. Donc, la communication constante et appropriée est importante car vous ne pouvez pas vous fier sur une norme établie pour présumer et prendre pour acquis que votre partenaire vous comprendra.

Cette stratégie a cependant des avantages évident. D’une part, elle favorise grandement la rétention de la clientèle. Dans le modèle monogame centré sur les coûts, rien n’empêche une personne d’être larguée si un partenaire plus adéquat se pointe à l’horizon! D’ailleurs, incidemment, une partie du cadre social et légal autour de la monogamie vise justement à créer un ensemble de contraintes qui rendent plus difficile de sortir d’une relation.  Dans un modèle non-monogame efficace, vous devez mutuellement constamment vous adapter à la réalité de votre segment de marché.

Cette stratégie réduit également l’impact de certaines externalités. La transmission des ITS en est un exemple: les gens monogames infidèles sont plus susceptibles d’avoir des comportements à risque que les gens pratiquant une forme éthique de non-monogamie.

À vous maintenant de déterminer ce qui fera votre valeur sur le marché des relations amoureuses: le faible investissement requis pour obtenir une relation standard, ou la différentiation qui vous apportera des avantages uniques mais nécessitant plus de travail!

 

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Le magasinage

« Ah, on l’sait ben, aujourd’hui les jeunes, avec les sites de rencontre en ligne, c’est comme du magasinage de partenaires… »

Euh… Parce que tu crois qu’on a inventé le magasinage au XXIème siècle?

(NDLR pour les Européens: « magasinage » est la traduction québécoise de « shopping »)

Bref, on retourne un peu en arrière, disons, dans le Québec rural d’antan. Et oups, le choix de partenaires soudainement vient de rétrécir pas mal. Du genre, une fois que tu rayes de la liste tout ceux qui ont un lien de parenté un petit peu trop évident, il ne reste plus grand monde. À part M. le curé et le grand Jack du fond du rang avec les dents toutes croches qui est confus depuis qu’il a mangé une ruade de sabots par la tête un soir de guignolée. Et M. le curé est comme pris ailleurs, disons.

Bref, c’est pas vargeux. Alors vous vous mettez à cinq-six paroisses pour organiser des veillées. Histoire de maximiser les chances de match, un peu. De faciliter le magasinage. Et encore, le choix est pas terrible. Tu vas t’estimer chanceuse si tu trouves un gars travaillant et pas trop ivrogne qui te sacrera pas une volée en rentrant à la maison. Et ça, pour ceux et celles qui fittent dans le moule binaire/hétéro. Je vous laisse imaginer le calvaire des autres.

Remonte dans le temps et le pattern reste le même. Jusqu’aux communautés primitives qui vont voler leurs partenaires dans les tribus voisines. Un rituel. Un rapt. C’est culturel. Pas sûr que c’est si agréable que ça moi…

Et le problème, derrière ça, c’est quoi? À part l’absence évidente de consentement? En partie l’absence de choix. Non seulement au niveau du partenaire, mais aussi au niveau de sa propre sexualité, de sa reproduction (ou pas!), de sa sécurité physique et émotionnelle. Une pauvreté si manifeste qu’on l’encode culturellement.

XXIème siècle. On a le choix. Et là y’a les nostalgiques férus de valeurs familiales qui vont se cacher sous une critique de la société de consommation en disant que, justement, c’est du gaspillage, de la consommation outrancière. Mais c’est un argument sans substance. Parce que rien n’est gaspillé. Une relation se termine, 10 autres pourront commencer. Rien ne se perd, tout se crée ou se transforme. Rien ne se perd, sauf vos codes culturels archaïques qu’on met aux poubelles avec un enthousiasme délirant.

Alors oui, on magasine. On écrit de nouveaux codes. Et c’est une maudite bonne affaire.

 

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Mais où est cet homme (cette femme) parfait(e)?

Vous l’avez tous déjà lu/vu/entendu:

« Où est-il, cet homme fidèle, charmant, sensible, intelligent, avec un emploi stable, ne vivant plus chez ses parents, honnête, avec une bonne libido? »

« Où est-elle, cette femme douce, allumée, juste assez perverse mais pas trop pour pas m’intimider, brillante, simple, disponible et prête à s’engager? »

Je veux pas vous faire de peine, mais je crois qu’il faut remettre les pendules à l’heure:

Nous sommes partout. Partout autour de vous.

Vous ne nous trouverez pas car vous avez oublié un détail important: l’offre et la demande. Et l’homme qui remplit tous ces critères, la femme qui remplit tous ses critères, surtout si il ou elle est intelligent(e) et brillant(e), maîtrise cette primordiale vérité.

Pourquoi bordel se contenter d’une seule personne quand manifestement nos qualités plaisent à plusieurs?

Pourquoi se limiter ainsi? Une personne si extraordinaire justement peut se permettre de choisir des partenaires qui n’essaieront pas de l’enchaîner, de le/la ralentir, voir de ruiner sa carrière (particulièrement vrai dans le cas des femmes).

Cette personne est libre. Libre de concevoir ses relations comme elle l’entend, avec qui elle l’entend. Libre du carcan de l’exclusivité.

Ça vous laisse quoi? Des restants. De la scrap. Et des relations en série aussi pitoyables les unes que les autres. Vous n’avez pas compris qu’au lieu de tout chercher chez une seule personne, cette personne quasi-divine, mythique, inexistante, vous pourriez  être plus heureux à découvrir une à une ces qualités et bien d’autres à l’intérieur d’un éventail de partenaires.

Arrêtez de vous plaindre. Sortez du moule.

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